MOHAND AIT HAMMADINE
    Mohand fils de Mohamed fils de Salah
    douar Ait Boujrouf
    dans la région d'Azilal
    paysan fils de paysan
    un peu d'orge
    un peu de blé
    un peu de maïs
    à peine de quoi vivre
    comme beaucoup de jeunes
    du village
    s'engagea au passage des soldats
    qui demandaient des volontaires
    que faire d'autre ?
    besoin d'argent
    besoin de travailler
    ce sera le 58ème Goum
    à Taounat
    1er novembre 1955
    quelques mois à peine
    d'armée française
    sans quitter le Maroc
    en 1956, c'est l'Indépendance
    Mohand fils de Mohamed fils de Salah
    choisit de rester dans l'armée
    Armée royale marocaine
    infanterie
    garnisons dans la plupart
    des villes du Maroc
    jusqu'à la retraite
    1986
    retour au village
    mais la pension est maigre
    difficile
    de faire vivre la famille
    jusqu'à ce qu''il apprenne
    par le bouche à oreille
    qu'on peut venir en France
    si on a la carte de combattant
    beaucoup hésitent
    beaucoup n'ont pas envie de venir
    beaucoup pas besoin de venir
    mais lui
    Mohand fils de Mohamed fils de Salah
    part
    parce que la vie est difficile
    parce qu'il n'y a rien au village
    part
    refait son sac de soldat
    la France qu'il n'a jamais vu
    Bordeaux
    Beauvais
    il est content
    d'être là
    se fait soigner
    des jours il rit
    des jours il pleure
    tant pis
    ce sera comme ça
    jusqu'à la fin de ses jours
    aller
    venir
    repartir
    revenir
    pas d'autre solution
    mais qu'au moins
    ils le sachant
    Malika
    Naïma
    Bouchra
    Rachid
    Adil
    Yassine
    fils et filles de
    Mohand fils de Mohamed fils de Salah
    qu'ils sachent et répètent
    à leurs enfants
    ce que leur père
    a fait pour eux
    à l'âge où il était encore jeune
    comme à l'âge où il est
    déjà vieux.
Olivier Pasquiers, photographe, membre de l'association "le bar Floréal. photographie"
